De nouvelles inquiétudes concernant la vente aux enchères de combustibles fossiles en RDC après la signature par le gouvernement des premiers accords de partage de la production de gaz

29 septembre 2023

Le gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) a attribué les premiers contrats dans le cadre d'un appel d’offres de 30 blocs de pétrole et de gaz méthane à une société qui n'est pas en règle avec le fisc américain aux États-Unis et à une autre sans aucune expérience connue dans l'industrie, ravivant ainsi les inquiétudes concernant l'appel d'offres controversé.

Lors d'une cérémonie organisée le 9 septembre le ministre des Hydrocarbures, Didier Budimbu, et le ministre des Finances, Nicolas Kazadi, ont salué la signature de contrats de partage de production avec Winds Exploration and Production LLC et Alfajiri Energy pour l'exploitation de deux blocs gaziers du lac Kivu, à l'est du pays.

Toutefois, des questions ont été soulevées quant à la diligence raisonnée du gouvernement dans le processus de sélection. Société basée à Houston, Winds Exploration and Production,qui a remporté le bloc gazier d'Idjwia vu son certificat d'organisation révoqué par l'État du Texas en juillet 2023 pour non-paiement présumé de la taxe de franchise de l'État, ce qui signifie que la société est légalement inactive et qu'elle n'a pas le droit de faire des affaires dans cet État[1]C’est donc difficile à voir comment un contrat avec la RDC comme celui du 9 septembre pourrait être attribué à une entreprise ayant un tel statut.

Entre-temps, le bénéficiaire du bloc de Lwandjofu,Alfajiri Energy, basé au Canada, semble n'avoir été incorporé qu'en janvier 2022, six mois avant le lancement de l’appel d’offres, et aucune information n'est disponible sur ses antécédents dans l'industrie.[3]

Malgré les tentatives de M. Budimbu de présenter l’appel d’offres comme un processus public, transparent et conforme à la loi[4]le gouvernement n'a pas encore publié les contrats, qui doivent spécifier le montant du « bonus de signature » à payer à la signature, conformément à la loi congolaise.[5]

La troisième entreprise à remporter un bloc de gaz du Kivu en janvier 2023, la société américaine Symbion Energy, semble ne pas avoir encore signé de contrat. L'entreprise est connue pour ses contrats en temps de guerre en Irak et Afghanistan.

Jusqu'à présent, Perenco est la seule grande compagnie pétrolière à avoir confirmé son intérêt pour l’appel d’offres. Le groupe franco-britannique, qui fait actuellement l'objet d'une d'une action judiciaire en France pour dommages environnementaux et d'une enquête pour corruptions'est qualifiée pour l’offre concernant les blocs pétroliers Yema II et Nganzi sur la côte ouest de la RDC, après avoir fait don de quatre Toyota Land Cruiser au ministère des Hydrocarbures de la RDC en juillet.

Les manifestations d'intérêt pour les blocs situés dans les provinces d'Ituri et du Nord-Kivu, déchirées par les conflits armés, dont deux chevauchent le parc national des Virunga, classé au patrimoine mondial, devraient être déposées dans les semaines à venir.

Joe Eisen, directeur exécutif de la Rainforest Foundation UK, a déclaré : « L’opacité de ce bradage de concessions gazières, trois mois à peine avant les élections présidentielles en RDC, soulève de questions importantes quant aux véritables bénéficiaires. Il est encore temps pour la RDC de tracer une voie différente vers un avenir à faible émission de carbone, une voie qui exploite l'immense potentiel du pays en matière d'énergies renouvelables et qui est ancrée dans les droits des communautés locales ».

Depuis son lancement en juillet 2022, l’appel d’offres de 30 blocs pétroliers et gaziers a suscité des critiques de la part des groupes de défense de l'environnement et des droits de l'homme.De nombreux blocs pétroliers chevauchent des zones protégées, des tourbières riches en carbone et les terres ancestrales de milliers de communautés locales..

« La vente de blocs pétroliers et gaziers – que nous continuons à décrier jusqu’aujourd’hui – échappe au principe de transparence qui doit régenter le secteur de ressources naturelles dans notre pays. Nous voulons savoir combien gagne l’État congolais dans les contrats déjà signés et la manière dont cela sera redistribué» dit Blaise Mudodosi, Coordonnateur National de l’ONG Actions pour la Promotion et Protection des Peuples et Espèces Menacés.

[1]  https://mycpa.cpa.state.tx.us/coa/coaSearchBtn et le code fiscal du Texas, Sec. 171.2515

[2] https://statutes.capitol.texas.gov/Docs/TX/htm/TX.171.htm#171.251

[3] Voir le site web d'Alfajiri Energy, https://alfajirienergy.com/

[4] La RDC accorde 3 blocs de gaz à des entreprises nord-américaines | Africanews

[5] Arrêté interministériel n°M-HYD/001/DBN/CAB/MIN.HYD/2021 et n°CAB/MIN/FINANCES/2021/147 du 28/10 portant fixation des taux des droits, taxes, et redevances à percevoir à l'initiative du ministère des Hydrocarbures, 28 octobre 2021, https://drive.google.com/file/d/1A7WKhcCcEnLR3-up7TnjZf00bOI6aZkf/view

*Mise à jour 18/10/2023 : L'entreprise a depuis affirmé qu'il s'agissait d'un oubli administratif mineur qui est en train d'être résolu.

PR_

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