Perspectives féminines sur le suivi des forêts au Cameroun, en RD Congo et au Ghana
8 mars 2019
Les femmes ont un rôle important à jouer dans la protection et la gestion de leurs forêts tropicales locales. Qu'il s'agisse de nourriture, de médicaments ou de bois de chauffage, les femmes du bassin du Congo dépendent largement des forêts tropicales pour leur subsistance. Elles ont tout intérêt à protéger leur environnement local, ce qui implique de préserver leurs forêts des menaces extérieures telles que l'exploitation forestière et minière illégale.
Malgré cela, les femmes sont souvent tenues à l'écart des décisions clés qui les concernent. Cela est souvent dû à un manque d'éducation formelle, à la responsabilité de s'occuper des enfants et aux normes culturelles traditionnelles. Ces obstacles peuvent toutefois être surmontés.
L'un des objectifs du projet Real-Time Monitoring (RTM) de RFUK en Afrique est de permettre aux femmes de jouer un rôle plus actif dans la protection de leurs forêts. D'une manière générale, le projet RTM consiste à fournir aux communautés les outils et le renforcement des capacités dont elles ont besoin pour faire valoir leurs droits et défendre leurs forêts. En utilisant des technologies mobiles personnalisées et faciles à utiliser, même les membres les plus marginalisés de la communauté peuvent participer, malgré leur manque d'éducation formelle. L'objectif étant d'autonomiser les femmes et de réduire les inégalités entre les groupes sociaux, les femmes constituent un groupe cible de participants à ce projet.
Souvent, ce dont on a le plus besoin, c'est d'un espace permettant aux femmes de participer à la gestion des forêts. Pour ce faire, il faut s'assurer que les femmes sont incluses dans les programmes de formation et les événements de sensibilisation, et que ces activités de renforcement des capacités sont conçues de manière à faciliter leur participation et leur contribution. Les petits groupes de discussion sont un bon moyen de gérer la dynamique de groupe et d'encourager la participation des femmes.
Les organisations partenaires GASHE (basée en RDC) et FODER (basée au Cameroun) ont récemment demandé à certaines des femmes participant au projet RTM leur avis sur le projet ainsi que sur les défis auxquels leurs communautés sont confrontées. Voici ce qu'elles ont dit à nos équipes :
L'équipe RTM : Pourquoi la forêt est-elle importante pour vous et votre famille ? Quelles ressources utilisez-vous dans la vie de tous les jours ?
Mari Mongo (Communauté de Bonganda, République démocratique du Congo) : "La forêt est notre vie. Le manioc, la viande, tout vient de la forêt".
Lucie Ntamdeh (village de Messok, district d'Assok, Cameroun) "La forêt me donne de l'argent pour envoyer les enfants à l'école. Je ramasse les fruits dans les forêts que je peux ensuite vendre".
Équipe RTM : Quels défis ou problèmes rencontrez-vous dans l'utilisation des ressources forestières ?
Mari Mongo (Communauté de Bonganda, République démocratique du Congo) : "Aujourd'hui, les difficultés liées à l'exploitation forestière sont plus nombreuses, en particulier pour le comité [de développement local] qui était censé surveiller les activités d'exploitation et garantir les bénéfices pour la communauté, mais rien n'a été fait et les sociétés d'exploitation forestière détruisent le peu que nous avons."
Lucie Ntamdeh (village de Messok, district d'Assok, Cameroun) "La collecte des produits forestiers devient difficile parce que la forêt est de plus en plus éloignée de [nos] maisons à cause des activités d'exploitation forestière."
L'équipe RTM : Avez-vous l'impression d'avoir votre mot à dire dans la prise de décision au sein de la communauté ?
Bokungu Mpeti (République démocratique du Congo) : "Pour nous, les femmes ne prennent pas de décisions. Mais depuis que GASHE nous forme, les femmes ont commencé à prendre des décisions parce qu'elles sont plus conscientes."
L'équipe RTM : Pourquoi avez-vous décidé de participer à ce projet ? Quels sont les aspects du projet qui vous intéressent le plus ?
Merveille Ekongo Etaka (Communauté de Boonde, République démocratique du Congo) : "J'ai accepté de participer à ce projet pour organiser les choses dans mon village. Pour nous, ces leçons sont très importantes pour prendre conscience de l'exploitation qui se fait autour de nous."
Rosalie Ndo (Communauté de Nkonmkak, Cameroun) "J'ai accepté de participer parce que cela me permet d'apprendre à défendre les droits de la communauté pour notre forêt communautaire où nous ne savons rien et où nous ne voyons pas où va l'argent".
L'équipe RTM : Appréciez-vous le projet jusqu'à présent ? Est-il utile pour vous ?
Bonzeme Tangotele (Communauté de Bokenge, République démocratique du Congo) : "Cette formation est très importante. Avant, nous avions les yeux bandés, mais maintenant nous avons ouvert les yeux et nous espérons que tout ira bien."
L'équipe RTM : Si vous pouviez donner des conseils à des femmes d'autres communautés du Cameroun, quels conseils ou souhaits donneriez-vous ?
Nadine Menyenedue (District d'Ebolowa, Cameroun) : "Les femmes doivent bien dialoguer avec leurs maris pour ne pas être en conflit et pouvoir participer aux activités de ForestLink RTM, pour dénoncer les mauvaises pratiques des exploitants forestiers".
Nous avons également eu la chance de recevoir un commentaire d'une participante de la RTM au Ghana. Beatrice Owusu, une monitrice communautaire de Dannso, dans la région d'Ashanti au Ghana, a déclaré à notre organisation partenaire, Civic Response :
"Je ne savais pas que la forêt nous appartenait à tous. Je pensais qu'elle appartenait aux gouvernements et je me souciais peu de ce qui lui arrivait. Maintenant que je sais qu'elle nous appartient à tous et que la communauté peut en tirer des avantages financiers, je suis heureux de contribuer à sa protection contre les activités illégales".
Nous avons ensuite posé quelques questions à l'organisation partenaire FODER, sur la base de son expérience de première main avec les femmes participant au projet RTM et à la gestion forestière en général. Voici ce qu'ils ont répondu :
Quelle est la situation des communautés avec lesquelles vous travaillez ? Comment l'exploitation forestière illégale les affecte-t-elle ?
L'équipe de FODER RTM : "Les communautés avec lesquelles nous travaillons vivent dans une situation précaire avec un accès très difficile à l'eau potable, à l'électricité, aux soins de santé, à l'éducation ? Elles sont pour la plupart ignorantes de la légalité forestière et de leurs droits et sont donc parfois impliquées dans l'exploitation forestière illégale. Ils perdent souvent les bénéfices de l'exploitation forestière qui devraient faciliter leur développement".
Quelles actions avez-vous entreprises pour mieux impliquer les femmes dans ce projet ?
L'équipe FODER RTM : "Lors des formations, des facilités particulières sont accordées aux femmes. Lors de la formation ForestLink à Akom2, par exemple, nous avons admis des enfants et facilité le transport de certaines femmes qui ne pouvaient pas être présentes en raison de l'isolement de leur communauté".
Quelle a été la réaction des femmes une fois qu'elles ont été impliquées dans ce projet ?
L'équipe de FODER RTM : "Ils sont satisfaits et fiers, et trouvent dans le projet une occasion de se sensibiliser et d'approfondir leurs connaissances."
La phase actuelle du projet RTM s'étend de 2018 à 2021 et se déroule en République démocratique du Congo, au Cameroun, au Ghana et en République du Congo. Une partie importante de la stratégie du projet se concentre sur l'autonomisation des femmes et d'autres groupes marginalisés de la même manière. Pour en savoir plus sur le projet de surveillance en temps réel dans le bassin du Congo, cliquez ici.
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