Un pas dans la bonne direction : Publication des lignes directrices de l'ICCN sur les mécanismes de plaintes
25 août 2023
Un pas important a été accompli récemment à Kinshasa pour garantir les les droits des millions de personnes qui vivent aux alentours des parcs nationaux de la République démocratique du Congo. Après un long processus de consultation des communautés locales et de la société civile, l'ICCN (Institut Congolais pour la Conservation de la Nature) a publié ses lignes directrices standard pour les mécanismes de plainte dans les zones protégées.
Les lignes directrices arrivent dans un contexte où l'ICCN - l'agence gouvernementale responsable de la gestion des parcs nationaux de la RDC - et les grandes organisations de conservation ont subi une pression croissante pour prendre des mesures afin de remédier et de prévenir les graves violations des droits de l'homme, comme celles qui ont fait l'objet d'une investigation et d'un rapport par la RFUK dans le parc national de la Salonga au cours des dernières années, et à la suite d'allégations récurrentes depuis lors.
Les mécanismes de plainte sont un outil essentiel pour traiter les questions relatives aux droits de l'homme. Ils permettent aux populations affectées par les activités des parcs de déposer des plaintes officielles, de les faire entendre et de les traiter équitablement. Mais ils doivent être mis en place avec soin et avec le plein accord des communautés qui vivent autour des parcs, afin de garantir la transparence et la responsabilité.
En principe, un système bien mis en place permettra aux communautés de faire part de leurs plaintes, notamment en cas de conflits liés à l'utilisation des terres et à l'accès à celles-ci, de mauvaise gestion de la part des autorités ou de non-réalisation des bénéfices du projet. En RDC, où des écogardes mal formés et manquant de ressources opèrent dans des zones isolées et touchées par des conflits, il faut malheureusement s'attendre à des violations des droits de l'homme.
La RFUK et ses partenaires, APEM et GeoFirst, avec le financement de Fondation Arcus, ont longtemps préconisé des mécanismes de plainte comme un outil important pour donner une voix aux inquiétudes des communautés concernant les violations des droits dans les parcs de la RDC. Il est positif que les directives publiées intègrent la forte influence et les recommandations de nos partenaires de projet. Plus particulièrement, les directives exigent que les mécanismes de plainte soient mis en œuvre par une organisation tierce, telle qu'une organisation de la société civile ayant la confiance des communautés, ce qui garantit l'indépendance par rapport à la gestion du parc.
Les directives prévoient également la formation d'observateurs communautaires afin de familiariser les communautés avec le mécanisme, le processus et leurs droits.
Malgré ces points positifs, les lignes directrices présentent encore d'importantes faiblesses, notamment en ce qui concerne l'accessibilité, surtout dans un contexte où de nombreuses communautés sont analphabètes, isolées ou marginalisées pour d'autres raisons.
D'autres questions restent à traiter. Les détails restent vagues, par exemple en ce qui concerne les normes et critères minimaux pour traiter les plaintes, ou ce à quoi devrait ressembler une bonne investigation. Il existe peu d'orientations pratiques en matière de sécurité sur la manière de gérer l'anonymisation ou, lorsque la confidentialité est promise, sur les mécanismes de mise en œuvre.
Il est à noter qu'il existe peu d'engagements pratiques pour remédier à la situation, si ce n'est le renvoi aux systèmes judiciaires existants, qui manquent de ressources, sont extrêmement difficiles d'accès et peuvent être partiaux.
Des questions importantes se posent également sur la manière dont les structures nécessaires à la mise en œuvre des mécanismes de plainte seront dotées de ressources et financées. Ce problème se pose particulièrement en RDC, compte tenu de la taille et de l'éloignement de ses parcs. Dans un avenir prévisible, de telles initiatives devront probablement continuer à être soutenues par des organismes de financement internationaux.
Néanmoins, la publication de ces lignes directrices doit être saluée. Elles énoncent des principes généraux importants et constituent un outil précieux, à la fois pour demander des comptes aux autorités chargées de la gestion des parcs et pour fournir une base permettant d'encourager l'élaboration et le pilotage de mécanismes de plainte dans des parcs spécifiques.
Alex Economou-Li, coordinateur du projet RDC de la RFUK, a déclaré, « Alors que les aires protégées de la RDC sont encore entachées de corruption et de violence envers les populations locales, la publication de ces lignes directrices représente un pas petit mais significatif pour ceux qui recherchent la justice. Le gouvernement s'étant engagé à protéger 30 % du territoire d'ici 2030, il est impératif que les efforts de conservation favorisent les droits de ceux qui dépendent de ces zones et les protègent, au lieu de les nier ».
Il s'agira d'une prochaine étape importante pour la RFUK et ses partenaires congolais, alors que nous continuons à faire pression pour l'adoption et le suivi adéquat d'un mécanisme de plaintes pour le parc national de la Lomamiet de préconiser plus largement le financement de ces initiatives par les donateurs internationaux pour la conservation afin de financer correctement de telles initiatives.
Les recherches menées par le RFUK ont montré à quel point il est essentiel que les droits de l'homme fassent partie intégrante des projets de conservation, dans l'intérêt ultime des communautés elles-mêmes et de la faune et de la flore.
Voir ici pour plus d'informations sur notre campagne sur la conservation durable et les droits de l'homme.
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